[ Groupe 10] Billet collectif – L’OTAN dans sa lutte contre le terrorisme
Bruxelles, le mardi 15 mars 2022, 16h51.
À l’heure où nous écrivons ces mots, la guerre en Ukraine fait rage depuis vingt jours maintenant. Alors que les possibilités qu’un conflit armé de telle ampleur éclate sur le sol européen nous paraissaient jusqu’ici illusoires, la violence l’aura finalement emporté sur la raison, avec les atroces conséquences qui s’ensuivent. Des milliers de familles déchirées, des victimes innocentes, des immeubles détruits à perte de vue.
L’objet de notre recherche ne se focalisera pas sur cette actualité marquante, n’ayant pas
suffisamment de recul sur ce qui se déroule actuellement. Néanmoins, le rôle majeur joué par
l’OTAN dans les crises sécuritaires internationales se voit tristement réaffirmé par ce conflit, et
nous pousse par ailleurs à questionner les limites de l’usage de la force en relations
internationales.
Dans le cadre de ce travail, il nous est paru essentiel de s’interroger sur l’enjeu, tout aussi actuel, qu’est celui de la lutte internationale contre le terrorisme à laquelle nous avons pu assister ces dernières décennies. En effet, la « guerre contre le terrorisme » menée par les pays occidentaux a pour ambition de lutter contre un phénomène multidimensionnel et global, justifiant la mise en place de mesures sécuritaires exceptionnelles. Malgré tout, le caractère imprévisible et dévastateur des actes terroristes traduit la complexité des mesures à entreprendre pour y faire face, comme l’illustre bien la citation ci-dessous.
Dans ce contexte, la nécessité de questionner la supposée neutralité et objectivité des acteurs
directement impliqués dans la lutte contre le terrorisme, et la production d’expertise en la
matière surgit. C’est pourquoi notre recherche se concentrera plus précisément sur cet aspect,
en posant la question suivante :
Comment le parcours académique et professionnel des praticiens au sein des agences affiliées à l’OTAN influence-t-il la production d’une expertise en matière de lutte contre le terrorisme à l’international, depuis 2015 ?
Cette enquête aura dès lors pour but de confirmer ou d’infirmer l’hypothèse selon laquelle le parcours académique et professionnel des praticiens spécialisés dans la lutte contre le terrorisme en Europe influence la fabrique d’une expertise sur le terrorisme, et ses caractéristiques. Pour cela, nous étudierons un échantillon de population issu de départements et agences spécialisées affiliés à l’OTAN que sont : le Defence Against Terrorism Programme of Work (DAT POW), et le Centre of Excellence Defence Against Terrorism (COEDAT). En effet, il serait utopiste de penser que les pratiques sécuritaires internationales ne soient pas un tant soit peu teintées d’une vision nationale de gestion du terrorisme.
L’intérêt derrière cette recherche portant sur cette thématique est tant bien personnel que scientifique. Tout d’abord, c’est naturellement que nous nous sommes intéressés aux enjeux sécuritaires comme la lutte internationale contre le terrorisme, car tous les membres qui composent notre groupe sont étudiants en relations internationales à finalité sécurité, paix, conflits et que cela fait partie de nos sujets de prédilection. C’est dans cette même optique que certains d’entre nous réalisent un mémoire sur la relation civilo-militaire, l’armement, les services de renseignement et encore d’autres. De plus, l’intérêt scientifique sera de comprendre et d’analyser dans quelles mesures les acquis personnels et professionnels ont un impact sur les politiques sécuritaires adoptées par l’OTAN.
L’approche théorique pour laquelle nous avons opté est celle du constructivisme, elle va nous permettre de discerner les différents facteurs à la base de l’élaboration d’une expertise propre aux organisations internationales de défense et de sécurité. Dès lors, nous souhaitons démontrer qu’une menace est identifiée et qualifiée de terroriste, car c’est le fruit d’un long processus de construction sociale et de perceptions de la part d’une certaine catégorie d’individus. Nous nous référerons notamment à l’article “La stratégie de l’Union européenne contre la criminalité organisée: entre lacunes et inquiétude” d’Amandine Scherrer et la thèse de Julien Pomarède, “Mises en scène et stratégies d’internationalisation de la « lutte contre le terrorisme » : Guerre, surveillance et armements à l’OTAN après le 11 septembre 2001”. Par ailleurs, cette recherche sera menée au prisme des théories de la sécurisation et de counter-terrorism, permettant d’appuyer nos propos au travers de divers travaux.
Afin de mener à bien notre travail, il nous semble judicieux de spécifier que nous utiliserons une méthode de recherche qualitative, plus précisément l’entretien semi structuré comme méthode de collecte de données. Il nous est apparu comme étant la méthode la plus à même de nous fournir des informations qui soient fiables et pertinentes. Dans ce cadre précis, il est essentiel de pouvoir diriger l’entretien avec nos terrains, à savoir les spécialistes au sein de l’OTAN en matière de lutte contre le terrorisme. D’une part, cela permettra une certaine interaction avec nos interviewés et d’autre part cela contribuera favorablement à l’obtention des données qui seront analysées et confrontées à notre hypothèse.
Bibliographie :
Livres :
-HORGAN J., 2022, The Psychology of Terrorism (Revised éd.), Londres, Routledge.
-MATHIEU, R., 2006, Défense contre le terrorisme : quelles coopérations entre l’Union européenne et l’Otan ?. Paris, Stratégique, 86-87, 99-119.
-NEAL A., 2010, Exceptionalism and the Politics of Counter-Terrorism: Liberty, Security and the War on Terror, Londres, Routledge.
-POMAREDE J., 2020, La fabrique de l’OTAN : Contre-terrorisme et organisation transnationale de la violence, Bruxelles, Editions de l’Université de Bruxelles (Collection Science politique).
Articles scientifiques
-BALZACQ T., “Théories de la sécurisation, 1989-2018.” Études internationales (Québec) 49, no. 1 (2018): 7–24.
-GALLAND J.P., “Gestion des risques, lutte contre le terrorisme.” Canadian journal of criminology and criminal justice 48, no. 3 (2006): 359–381.
-SANDLER T., “Terrorism and Counterterrorism: An Overview.” Oxford economic papers 67, no. 1 (2015): 1–20.
-SCHERRER A., “Lutte antiterroriste et surveillance du mouvement des personnes.” Criminologie (Montréal) 46, no. 1 (2013): 15–31.
Thèses
-POMARÈDE J., Mises en scène et stratégies d’internationalisation de la « lutte contre le terrorisme » : Guerre, surveillance et armements à l’OTAN après le 11 septembre 2001, 714
pages.
Acte de conférence
-ENGLISH R., “Illusions of Terrorism and Counter-Terrorism”. Oxford, England: Published for the British Academy by Oxford University Press, 2015.