– RESULTATS – Opinions et réactions des journalistes face au discrédit des médias traditionnels – Bergman Eitan, El-Faziki Monia, Vitale Alessia Giovanna

– RESULTATS – Opinions et réactions des journalistes face au discrédit des médias traditionnels – Bergman Eitan, El-Faziki Monia, Vitale Alessia Giovanna

Résultats de notre enquête sur le discrédit des médias traditionnels

Après avoir mené pas moins de sept entretiens avec des journalistes (dont trois avec des journalistes italiens et quatre avec des journalistes francophones (de trois pays différents)), nous avons réussi à dégager des tendances générales, et parfois des tendances « nationales ». Une fois nos résultats centralisés, nous avons comparé, pour chaque question clé, les réponses et la tendance générale avec d’abord les deux hypothèses mais également avec la littérature scientifique afin de voir si les journalistes se rapprochaient ou non du discours dominant.

Après analyse et interprétation des résultats, il est à constater que nos hypothèses se voient infirmée pour la première et confirmée, mais seulement en partie pour la seconde. Pour ce qui est de la comparaison avec le discours dominants, mis à part sur un point, nous pouvons constater que les journalistes se rapprochent fortement des auteurs.

 

En ce qui concerne notre première hypothèse :

Rappel : Plus les journalistes ressentent la fracture qui les divise des citoyens et le fait que ces derniers les considèrent faire partie d’une classe unique, les regroupant avec les politiques, plus les journalistes tendent à se distinguer, de par la forme et le fond de leur travail, de la classe politique afin de réduire cet écart.

Elle se trouve infirmée car d’une part la majorité des journalistes interrogés ne ressentent pas de « fracture » malgré le fait qu’ils en aient entendu parlé, et donc sont conscient de son éventuelle existence. D’autre part, si telle « fracture » existait, celle-ci n’a aucun impact sur leur travail (ou très faiblement pour des journalistes italiens). De manière générale, les journalistes italiens se sont montrer plus conscients d’une potentielle « division » et ont exprimés leurs efforts afin d’y remédier en rendant l’information plus lisible, « sexy » et attrayante. Cependant, les journalistes francophones soulignent que malgré ce qu’ils en ont entendu, ils ne ressentent pas sur le terrain une telle « fracture » et que de toute manière, la qualité de l’information ne peut être influencée par quoi que ce soit.

De plus, tous les enquêtés ont souligné être indépendants par rapport au monde politique. Cependant ils rappellent que les liens entre ces deux mondes sont nécessaires à la bonne conduite de leur travail. En effet, l’un a besoin de l’autre pour « survivre ». Cela ne fait pas pour autant des journalistes des politiciens ad hoc. Il faut noter qu’ils sont conscients d’une telle catégorisation par les citoyens, notamment dû au fait qu’ils sont souvent assimilés à des institutions (médiatiques) et que ces dernières souffrent, par transposition, des mêmes maux que les institutions politiques et leurs agents.

 

En ce qui concerne notre seconde hypothèse :

Rappel : D’une part, les journalistes des médias traditionnels travaillent sans s’imposer de frontière (dans leur croyance de 4ème pouvoir), de l’autre, parfois, ils ont tendance à limiter certains points de leur travail (« autocensure ») afin de ne pas trop froisser l’opinion publique et d’ainsi conserver, de manière positive, leur influence.

Cette hypothèse se voit confirmée mais seulement en partie ; les journalistes travaillent en toute liberté. L’actualité s’impose à eux, et non l’inverse. Cependant, pour les journalistes italophones, la ligne éditoriale revêt une importance particulière. On pourrait s’interroger afin de savoir si les journalistes francophones interviewés n’ont pas intentionnellement réduit l’importance de leur ligne éditoriale.

A l’unanimité, les interviewés récusent le terme d’autocensure mais parlent plutôt d’autocontrôle ; des limites à ne pas dépasser. Le but n’étant en aucun cas de ne pas froisser l’opinion publique mais plutôt de faire un travail de filtrage et de cadrage de l’information.

Unanimement, les journalistes s’accordent sur le fait qu’une sensibilité politique personnelle existe mais ne doit en aucun cas interférer avec leur travail. Quand ils sont dans leur peau de journalistes, ils doivent retirer leurs lunettes personnelles pour enfiler leur paire de journalistes. Le but ultime étant de fournir au citoyen une information factuelle, neutre, objective et surtout vérifiée. Les italiens eux soulignent l’importance de rendre l’information lisible, ils parlent de « sex appeal » mais sans pour autant changer le fond (le factuel) de l’information.

De manière générale, les journalistes ne se considèrent pas spécialement comme étant un 4ème pouvoir mais par contre, se sentent réellement investit d’une mission : rendre la meilleure information possible accessible à tous.

 

Enfin, vis-à-vis de la littérature scientifique, il faut bien admettre que les résultats des interviews menées se rapprochent du discours dominant. D’abord sur le fait que le concept est nouveau et parfois inconnu. Certains enquêtés ont exprimé leur méconnaissance de la post-vérité. Comme le soulignait Jean François Daoust, les moyens d’informations sont de plus en plus importants et les journalistes souligne l’importance de fournir une information vérifiée dans un monde où tout est de plus en plus rapide et où la concurrence entre les médias fait rage. Comme le soulignaient des chercheurs, les journalistes ne pensent pas que les fake news ont eu un réel impact sur l’élection de Donald Trump mais que ce problème risque, dans un avenir plutôt proche, de poser de sérieux problème et que par conséquent, il est primordial de s’y atteler. La transposition de la méfiance des institutions envers les institutions médiatiques est aussi confirmée. Journalistes et auteurs s’accordent sur le problème de l’érosion du débat de fond par rapport aux émotions, rendues nécessaire par la concurrence entre les médias, expliquée par la pénétration du champ économique dans le champ journalistique (selon Pierre Bourdieu). Ils s’accordent aussi sur le fait que la critique des médias (par la classe dirigeante) n’est pas nouvelle et que cela date parfois de plusieurs siècles. Enfin, ils rappellent que le monde médiatique ne peut subsister sans le monde politique et vice-versa.

 

Les journalistes se distinguent de la littérature en ceci qu’il se considère indépendants de la sphère politique alors que certains auteurs estiment quant à eux que les connivences entre ces deux mondes sont trop fortes.

 

De manière générale, nous pouvons donc dire que nos hypothèses n’ont pas été vérifiées mais que les résultats des entretiens se rapprochent de la littérature. Il faut souligner aussi qu’il existe des tendances nationales (linguistiques).

 

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