[Groupe 6] : Bénéficiaires des banques alimentaires : reflet d’une inégalité grandissante pendant la crise du Covid 19
Dans le cadre du cours de méthodes d’enquête de terrain, nous avons été amenés à aborder le thème des inégalités. En cela, nous avons décidés de nous concentrer sur les inégalités qui ont émergé et/ou été renforcées durant la pandémie du Covid-19, ce qui nous a conduits à traiter des distributions alimentaires gratuites à Bruxelles.
L’alimentation est considérée comme un marqueur de pauvreté et aujourd’hui, de nombreuses analyses sociologiques abordent l’alimentation comme facteur d’inégalités sociales. De façon générale, la pauvreté est une problématique complexe qui s’étend à différents domaines de l’existence. Paturel et al (2015), mentionnent dans leur recherche que « la littérature a vu évoluer la façon de prendre en compte l’alimentation comme un des marqueurs de la pauvreté». Les études existantes sur la précarité alimentaire ont pour la plupart du temps été « segmentées et institutionnalisées empêchant de traiter la question en termes de justice sociale et de comprendre l’inaccessibilité comme inégalité » (Paturel et al., 2015). La précarité alimentaire rassemble une multitude de facteurs de types économiques – les inégalités ou l’absence de revenus–, culturels – obtention d’un diplôme dans le passé – ou encore sociaux – avec l’exemple de l’accès à un logement – (Ibid).
Toutefois la crise sanitaire du Covid-19 change l’approche de l’alimentaire : les banques alimentaires se sont retrouvées sur le devant d’une scène qui ne cesse d’avoir un public de plus en plus important. Une augmentation de 15% (FBBA, 2021), a pu être observée en une seule année et en 2020, entre « 175 000 et 195 000 personnes selon les mois ont fait appel à l’aide alimentaire fournie par les associations » en Belgique (Birouge, 2021 ; FBBA, 2021). Cette augmentation drastique est indéniablement liée à la crise du Covid ; des individus aux parcours très singuliers se retrouvent sous une seule et même dénomination et rentrent désormais dans la catégorie de la précarité alimentaire. Ainsi un nouveau public ne se composant pas que de familles monoparentales ou de chômeurs a émergé.
C’est à partir de ces données que nous avons choisi d’investiguer l’évolution du profil des bénéficiaires des banques alimentaires de Bruxelles durant la pandémie pour questionner les idées reçues.
Notre hypothèse de départ était la suivante : la majorité des nouveaux profils bénéficiaires des banques alimentaires de Bruxelles durant la pandémie est issue du monde étudiant. Toutefois, nos premières études de terrain et observations nous ont permis de constater que notre hypothèse initiale ne représentait qu’une partie de la vérité. Contrairement à ce que nous supposions, de nombreuses personnes ne peuvent plus assurer financièrement leur survie alimentaire suite à la crise du Covid-19 et l’impact que cette dernière a eu sur le secteur économique.
Effectivement, de nombreux étudiants ayant des emplois saisonniers/job étudiants se sont retrouvés sans financement et obligés de demander une aide alimentaire. Mais contrairement à ce que l’on pensait, de nombreux autres profils ont été observés. Par exemple, de jeunes adultes, n’ayant pas pu trouver de travail à la suite de leurs études se sont retrouvés sans financement et obligés de recourir à ce type d’aide. C’est le cas aussi pour de nombreux travailleurs indépendants qui ont dû fermer suite aux restrictions sanitaires, se trouvant eux aussi dans une situation précaire. A travers ces observations, notre hypothèse de départ s’est modifiée: Il existe de nouveaux profils de bénéficiaires des banques alimentaires de Bruxelles durant la pandémie.Il nous est donc paru plus intéressant de nous focaliser sur la totalité des nouveaux profils bénéficiant des banques alimentaires suite à la pandémie.
Notre question de recherche centrale a donc été modifiée :
Quelle est l’évolution du profil des bénéficiaires des banques alimentaires de Bruxelles au travers de la crise du Covid 19 ?
Cette interrogation mène à d’autres questions majeures : Qui sont ces nouveaux demandeurs? Comment ont-ils entendu parler de l’aide alimentaire ? Retrouve-t-on le même profil de personnes dans plusieurs communes ? Quand ont-ils commencé à y aller ? Quel impact cette aide alimentaire a-t-elle sur leur vie ? Sentent-ils un avant/après Covid (plus de monde, différents profils ?) ? Vont-ils à plusieurs distributions par semaines ? Vont-ils dans des communes différentes ? Se nourrissent-ils seulement de cela ou est-ce un « complément » ? Ressentent-ils une honte à y aller ? Ont-ils déjà été à une distribution sans pouvoir y bénéficier ? etc.
Pour mener notre enquête et répondre à notre problématique, notre méthode sera une combinaison entre des d’observations non participantes et des entretiens semi-directifs. Nous irons observer différentes distributions alimentaires gratuites et ouvertes à tous à Bruxelles et nous nous entretiendrons avec des bénéficiaires de ces aides.
Pour ce faire, nous avons contacté différents frigos solidaires de différentes communes bruxelloises, définies comme « aisées » : Uccle, Saint-Gilles, Ixelles et Etterbeek, qui nous ont répondu positivement.
Ces différentes associations proposent deux distributions par semaine, et nous aimerions aller en observer deux par associations. Nous y observerons le type de population et le nombre de personnes s’y présentant. Ceci dans le but de rendre compte que ces aides sont de plus en plus indispensables pour un nombre grandissant de personnes, mais aussi pour dépasser les idées- préconçues quant aux populations utilisant ces dispositifs d’aide, car aujourd’hui, la population qui s’y rend est de plus en plus hétéroclite, et ce même dans les communes de la capitale considérées comme privilégiées.
D’autre part, nous aimerions procéder à des entretiens, avec les responsables de ces associations, mais aussi avec des bénéficiaires. Pour cela, nous sommes déjà en contact avec certains responsables, et aimerions pouvoir prendre contact avec des personnes que nous verrons durant nos récoltes de données sur le terrain, tout en leur garantissant l’anonymat. De plus, nous avons déjà des contacts avec des étudiants qui se rendent à des distributions hebdomadairement.
Nous aurons donc deux grilles d’entretien afin de mener à bien nos entretiens : une pour les responsables des associations, l’autre pour les bénéficiaires. L’entretien semi-directif nous semble être le plus approprié pour notre recherche, car il nous permettra de conduire l’entretien et de récolter les informations dont nous avons besoin, tout en nous laissant la possibilité d’approfondir notre sujet en fonction des personnes interviewées.
BIBLIOGRAPHIE
Fédération Belge des Banques Alimentaires (FBBA). (2021). Foodbank | News. https://www.foodbanks.be/fr/news
Paturel, D., Marajo-Petitzon, É., & Chiffoleau, Y. (2015). La précarité alimentaire des agriculteurs. Pour, N° 225(1), 77‑81.