[Groupe 10] – Billet collectif – L’impact des occupations politiques sur la régularisation des sans-papiers à Bruxelles. Le cas de l’Eglise du Béguinage.

[Groupe 10] – Billet collectif – L’impact des occupations politiques sur la régularisation des sans-papiers à Bruxelles. Le cas de l’Eglise du Béguinage.

La Belgique compterait sur son territoire entre 100 000 et 150 000 sans-papiers. Leur régularisation est régie par l’article 9 bis de la loi de 1980, qui conditionne l’obtention d’un titre de séjour à l’existence de circonstances exceptionnelles. Le caractère exceptionnel de la demande doit être prouvé par le ou la requérant·e qui doit « démontrer qu’il ou elle lui est particulièrement difficile de retourner demander l’autorisation visée dans son pays d’origine ou dans un pays où il ou elle est autorisé·e au séjour », comme dans le cas d’une maladie qui met en danger l’intégrité physique et qui ne peut être soignée dans le pays d’origine. En dehors de cette exception, l’entrée sur le territoire belge doit être demandée au consulat belge du pays d’origine, plaçant dans l’illégalité toutes les personnes arrivées sans procédure sur le territoire. Aucun critère précis ne délimite les admissions, c’est à l’Administration de rendre sa décision dans un flou juridique qui lui confère un pouvoir discrétionnaire. Les sans-papiers sont dénués des droits les plus élémentaires et vivent sous la menace permanente de l’expulsion. Cette situation, régulièrement dénoncée par les associations, s’est dégradée en raison de la pandémie actuelle. C’est dans ce contexte qu’a débuté, le 28 janvier dernier, une occupation de l’église du Béguinage à Bruxelles par des sans-papiers réclamant leur régularisation. Ils sont aujourd’hui environ 200 à occuper jour et nuit l’église, soutenus par plusieurs associations qui participent à l’organisation matérielle et au relai des revendications.

À travers notre enquête, nous tenterons ainsi d’apporter une réponse à la question suivante : « Quelles sont les relations qu’entretiennent les sans-papiers occupant l’Église du Béguinage et les différents groupes d’acteurs impliqués dans cette occupation politique ? » Avec cette question nous essaierons de mettre en lumière le rôle, l’implication et les relations des différents acteurs prenant part à cette occupation politique.

Il ne s’agit pas de la première occupation politique d’une église par des sans-papiers. Nous pouvons citer par exemple le cas de l’église Saint-Bernard en France en 1996 ou celle de l’église de la Sainte-Croix à Ixelles en 2003. Ces occupations politiques sont des indicateurs d’un dysfonctionnement du système d’intégration des personnes migrantes. Les associations de bénévoles ont pris, dans certains cas, plus d’importance et d’initiatives que les administrations institutionnalisées. Néanmoins, il est intéressant de remarquer, à la lumière de la littérature traitant de ce sujet, que les sans-papiers et les associations bénévoles ne sont pas les seul·e·s acteur·rice·s prenant part aux manifestations des personnes en situation irrégulière. Il est arrivé, notamment en Belgique, que des syndicats, voire des citoyen·ne·s lambda, s’unissent à leur cause pour les soutenir.

L’intérêt premier de cette recherche est donc d’identifier quel·le·s acteur·rice·s sont impliqué·e·s dans cette occupation politique et d’analyser leurs buts, leurs impacts et les relations que tous·tes entretiennent entre elleux. Il peut exister des tensions, des buts légèrement différents entre tous·tes ces différent·e·s acteur·rice·s. Il est donc important de saisir leur utilité, ainsi que la portée de leurs actions pour cette cause. Par exemple, est ce que les associations de soutien aux sans-papiers ne s’impliquent que dans cette occupation politique, ou apportent-elles également un soutien administratif ? En France, par exemple, il est déjà arrivé que les institutions politiques engagent des bénévoles pour aider à la mise en place d’un processus d’intégration. Tous ces cas antérieurs nous permettent de nous demander ce qu’il en est pour le cas de l’Église du Béguinage.

Malgré le contexte sanitaire lié à la crise du coronavirus, nous avons la chance de pouvoir faire de l’observation participante. Il nous semble important de nous détacher des discours médiatiques pour pouvoir analyser le premier discours, la première parole des acteurs concernés. De plus, ce travail nous demandera une rigueur non négligeable. De par notre posture de chercheurs dans le cadre d’une observation participante, nous devrons faire attention à effectuer nos visites sur place séparément de façon à ce que notre présence ne dérange pas l’environnement existant.

Pour cette recherche, nous allons opter pour une approche inductive. En effectuant des observations sur le terrain et en nous détachant de toute hypothèse, nous pourrons réduire le risque de biais et de préjugés dans notre approche, ce qui nous semble nécessaire au vu de la nature sociale controversée du sujet abordé. Les différentes observations et interactions que nous serons amené·e·s à faire feront probablement évoluer notre approche. Ainsi, nous devrons conserver une certaine flexibilité afin de ne pas être contraint·e·s par un cadre théorique inapproprié face à la réalité du terrain.

Notre accès au terrain dépend d’un acteur intermédiaire. La perception de notre présence sur place pourrait ainsi avoir une influence sur nos interactions avec les différent·e·s acteur·ices concerné·e·s. Il nous faudra donc faire attention à prendre ce biais en compte au moment de la récolte de données.

Bourgois, Louis, et Marion Lièvre. « Les bénévoles, artisans institutionnalisés des politiques migratoires locales ? » Lien social et Politiques, no 83 (2019): 184. https://doi.org/10.7202/1066090ar.

Faux, Jean-Marie. « Les sans-papiers en Belgique. État de la question ». Pensee plurielle n° 21, no 2 (14 septembre 2009): 137‑49.

Martiniello, Marco, et Andréa Réa. « Les sans-papiers en Belgique ». Hommes & Migrations 1238, no 1 (2002): 89‑99. https://doi.org/10.3406/homig.2002.3867.

Mauzé, Gregory, et Youri Lou Vertongen. « 1974. Migrants et syndicats se mobilisent en Belgique ». Plein droit n° 115, no 4 (2017): 32‑36.

Pette, Mathilde. « Associations : les nouveaux guichets de l’immigration ? Du travail militant en préfecture ». Sociologie Vol. 5, no 4 (2014): 405‑21.

Vertongen, Youri Lou, et Hélène Spoladore. « De la crise des sans-papiers en Belgique ». Plein droit n° 119, no 4 (2018): 21‑24.

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