(Groupe 10) Billet individuel – Filippo Giacinti-Billet
Les habitudes de consommation et leurs déterminants
A partir de nos entretiens concernant les habitudes de consommation dans cinq quartiers de Bruxelles, nous avons constaté que la plupart des gens privilégient (ou au moins réalisent) les achats dans les grandes surfaces plutôt que dans les commerces de détail spécialisés, surtout lorsqu’on parle d’achats alimentaires. Ce phénomène n’est pas limité exclusivement à certains quartiers de Bruxelles, il est identifiables dans une majeure partie d’Europe, et nous n’en sommes pas étonnés. En 2016 l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) lançait une enquête sur les habitudes de consommation pour les achats alimentaires en France. L’enquête, publiée sur Le Figaro, soulignait que pour leurs courses alimentaires les Français réalisent 72,2% de leurs dépenses dans les grandes surfaces (hypermarchés, supermarchés et hard discount) et 14,9% dans les commerces de détail spécialisés, comme les boulangeries, boucheries ou épiceries. La question est de savoir quels facteurs peuvent influencer les habitudes de consommation en faveur des unes ou des autres.
Les prix : le prix est souvent l’élément le plus important lors d’un achat, et il détermine aussi le lieu de ce dernier. À ce propos il est prouvé que dans les grandes surfaces les prix sont inférieurs. Les grandes surfaces ne représentent en effet que des détaillantes et, très souvent, elles sont liées aux producteurs par ce qu’on les appelle des contrats de fixation des prix au détail. Cela veut dire que c’est le producteur qui fixe le prix auquel sont soumises les grandes surfaces, qui n’ont par conséquent aucune marge d’action dans la fixation des prix. Très souvent, les prix imposés par les grands producteurs sont significativement inférieurs par rapport à ceux des petits commerces en raison des économies qu’ils peuvent réaliser par la production en vaste échelle.
Vaste choix : il est indéniable que le vaste choix de produits proposé par les grands magasins représente un avantage pour tous les clients, en termes de gain temps notamment. Dans une société de plus en plus frénétique, l’éventail de produits différentes que l’on peut retrouver dans un même magasin permettre de récupérer du temps et de le consacrer à d’autres choses.
Nombre : le nombre croissant des grandes surfaces qu’on peut retrouver dans chaque quartier de Bruxelles, et plus en général, dans chaque ville européenne, joue un rôle important puisque il orient les habitudes des consommateurs. Au moins qu’il ne soit que pour un produit exclusif et vraiment particulier, pourquoi est-ce qu’on devrait visiter dizaines de petits commerces alors qu’on a la possibilité de trouver tout ce qu’on nécessite dans la surface proche de chez nous ?
Services au client : souvent on a entendu dire qu’un service de qualité est la clé pour qu’une activité soit profitable. Or, si on analyse certaines caractéristiques des consommateurs on pourra comprendre que cette règle n’est pas toujours applicable. En effet, si certains clients recherchent une interaction intime et souhaitent instaurer un rapport de confidentialité avec les employés des magasins, beaucoup d’autres n’ont aucun intérêt par rapport à cela.
Les horaires : Comment pourrais-je de trouver du temps à consacrer à mes achats si je travaille les mêmes jours et les même horaires que la plupart des commerçants ? Cette problématique ne se pose pas si on décide d’acquérir dans une grande surface. Elles sont ouvertes sept jours sur sept et ont une amplitude horaire d’ouverture importante (en général 08h/21h). On y vient pour se restaurer le midi et faire des achats le soir en sortant du travail, donc elles peuvent devenir un endroit confortable et de regroupement aussi.
On pourrait ajouter d’autres composantes qu’orientent les habitudes des consommateurs, comme l’explosion des services de livraison dans les dernières années ou les stratégies de marketing mises en place par certaines grandes surfaces dans le but de faire tomber l’intérêt du client sur un produit qu’il ne voulait pas acquérir dans un premier temps, mais les facteurs énoncés semblent déjà suffisantes pour comprendre comment et pourquoi les grandes surfaces représentent le premier choix pour beaucoup de consommateurs, non seulement à Bruxelles.
J’essayerai de démontrer l’influence de ces facteurs d’un point de vue analytique à travers d’un modèle économétrique de régression linéaire simple. La variable explicative (Yi) représente le niveau/quantité de
produits achetés ; en ajoutant à la régression les variables qu’influencent les habitudes de consommation
(précédemment exposées) on pourra confirmer ou infirmer notre hypothèse.
Hypothèse : la plupart des éléments déterminants les habitudes de consommation amènent à privilégier les grandes surfaces
Yi= B0+ B1X1+ B2X2+B3X3+B4X4+,…,+ἐi
Où :
- Yi= est la variable dépendante qu’on souhaite expliquer, la quantité d’achats du consommateur A
(n’importe où, si dans les grandes surfaces ou dans des petits commerces) ;
- X1= niveaux des prix ;
- X2= le nombre des grandes surfaces dans une certaine zone (proche de chez nous)
- X3= le type de client ; comme cette variable est qualitative on peut la transformer en variable
« dummy » (quantitative) afin de poursuivre l’étude de la régression. Donc, X3= 0 si le client souhaite instaurer un rapport de confidentialité avec les employés, X3= 1 sinon.
- X4= le nombre d’heures pendant lesquelles le petit commerce ou la grande surface sont ouvertes
- ἐi= une marge d’erreur qu’il faut toujours prévoir dans ces types de spécifications
- B0= est une constante, ça veut dire que si la régression n’incluait pas les autres variables, le niveau
d’achat serait égale à B0 (ce qui n’est pas le cas)
- B1…B4= ce sont les coefficients des variables explicatrices (X1…X4)
À titre d’exemple, si B1= -0,181 alors une hausse des prix de l’1% entraînerait une baisse de la quantité des achats (Yi) du -18,1% (soit -0,181×100), ce qui veut dire qu’une réduction des prix de l’1% entraîne une augmentation d’(Yi) du +18,1%. Également, B2= 0,032 signifie que l’ouverture d’une nouvelle grande surface près de chez nous entraîne une hausse dans le niveau d’achat de +3,2%. *
Or, il est évident qu’une telle spécification ne pourra jamais être considérée statistiquement significative puisque elle n’a pas été réalisée à travers de softwares informatiques comme pourrait l’être STATA et, surtout, parce qu’elle n’est fondée que sur des hypothèses. En effet, la plupart des variables que j’ai inclus dans la régression jouent en faveur des grandes surfaces, ce qui pourrait certainement rendre la régression biaisée. Cependant, certaines d’entre elles correspondent aux facteurs principaux énoncés par nos interviewés. Par conséquent la régression confirme, à niveau purement logique, la validité de nos constatations et de l’hypothèse.
1 *Les deux variables amènent à privilégier les grandes surfaces puisque c’est ici qu’habituellement on y retrouve des prix plus abordables (l’idée de réduction des prix dans la régression).